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Article mis en ligne le 23 janvier 2014
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Disparition des RASED : le changement dans la continuité

Une sédentarisation à pas feutrés des postes E, un réel changement des missions des postes G plus la création d’un Pôle Ressource de Circonscription sont autant d’éléments qui ne laissent rien augurer de bon pour l’avenir des RASED. Décryptage et analyse de SUD éducation Loire

Depuis le 18 novembre, des groupes de travail ont lieu au ministère pour redéfinir les missions des personnels : « évolution des métiers de l’Education Nationale ». SUD éducation était présent aux deux groupes de travail qui se sont tenus le 26 novembre et le 3 décembre sur les RASED.
Les premières fiches de travail du ministère pouvaient laisser entrevoir, aux plus naïfs d’entre nous, un nouveau printemps pour les RASED. En effet, les propos introductifs portaient une critique du gouvernement précédent : « … les personnels ont cependant connu une diminution massive de leurs effectifs au cours du quinquennat précédent, et ont vu leur existence même remise en cause. Il est donc indispensable de conforter leurs missions, tout en leur permettant de mieux cibler leurs actions et d’organiser l’aide au meilleur niveau en fonction des besoins locaux. »
On pouvait alors s’attendre à un plan d’urgence de recréation de postes. Les réponses en sont très éloignées. Non seulement les postes RASED sacrifiés sous la droite ne seront pas rétablis mais – sous un toilettage habile – les missions censées être confortées sont modifiées et la création d’un Pôle Ressource de Circonscription signe la disparition de fait de l’entité RASED.

Des Postes au compte-gouttes

L’affichage ministériel est clair : « … il faut relancer la formation pour répondre aux postes vacants et aux postes créés ». Près de 5000 ont été supprimés et certains définitivement ; ces derniers ne sont donc pas concernés par cette mesure. Lorsque nous avons demandé au MEN si les 5000 postes perdus seraient recréés, même progressivement, la réponse est elle aussi très claire : « Un travail académique sur la carte des postes dans le cadre d’un pilotage national… » Nous connaissons tous et toutes ce qu’il en est du pilotage national et le travail académique ne devrait pas améliorer la donne. Faut-il se satisfaire de miettes ?
Pour SUD éducation, cette annonce n’est pas de nature à apporter du crédit à l’orientation du MEN. Le peu de moyens ne permettra pas un re développement massif des RASED, indispensable pour aider les élèves en difficulté à se réapproprier l’école. Tout ceci pérennise les pseudo dispositifs d’aide (AP, stages de remise à niveau) introduits par l’ancienne majorité et qui n’ont pas été abrogés.

Un changement notable des missions

Là encore, il y a une réelle différence entre l’affichage : « Des RASED aux missions confortées » et la déclinaison des différentes missions des enseignant-e-s spécialisé-e-s.
Les premières fiches du MEN laissaient entrevoir pour les postes E une quasi sédentarisation. Sous la pression des syndicats, le passage l’évoquant a été enlevé mais cette possibilité est encore bien réelle, même avec les nouvelles fiches. La suspicion est forcément grande car l’objectif initial était très clair : « Aide à l’élève ou au groupe d’élève ....... majoritairement réalisée dans la classe, en coordination avec l’enseignant ». La confusion entre le maître surnuméraire et le poste E n’est vraiment pas loin et le glissement pourrait s’opérer assez facilement dès lors que l’entité RASED disparaîtra. Cette volonté affichée dès le départ n’est pas la conséquence d’une maladresse d’écriture : les orientations du MEN s’inscrivent toujours dans les mêmes logiques.

Des psychologues au service de l’institution
Avec un rattachement à la circonscription (cf. Pôle de Ressources de Circonscription), les psychologues seraient perçu-e-s comme les chargé-e-s de mission des IEN, avec tous les risques que cela comporte : comment exprimer des difficultés si on croit que son interlocuteur ou interlocutrice pourrait les rapporter à l’IEN ? C’est la négation de la place de la psychologie à l’école qui fait par définition du psychologue à l’école, un professionnel de terrain, de proximité, qui peut répondre à la fois à la demande des élèves, des parents, des enseignant-e-s hors de tout contexte hiérarchique, évaluatif ou normatif. C’est pour les psychologues des RASED, ouvrir grande la porte vers une dérive qui consistera à les faire intervenir sur ordre de l’IEN sous couvert d’expertise, au coup par coup. C’est abandonner toute notion de neutralité, de bienveillance voire d’écoute.

E et G : un traitement différencié…
Bien pire encore est la situation des postes G car leurs missions loin d’être confortées sont complètement modifiées. Pour bien comprendre ce changement, il faut mettre en confrontation les deux anciennes circulaires (2002 et 2009) et les nouvelles fiches. Si la circulaire de 2009 mettait sur le même plan le travail des ensei-gnant-e-s spécialisé-e-s et indiquait très précisément leurs missions : « Les enseignants spécialisés apportent une aide directe aux élèves en difficulté… » et « Les enseignants spécialisés peuvent intervenir directement dans la classe, regrouper des élèves pour des durées adaptées à leurs besoins, ou leur apporter une aide individuelle. » il en serait différemment aujourd’hui si les propositions ministérielles voyaient le jour. Si l’aide à l’élève était déjà présente sur les premières fiches de travail des collègues E, cela n’apparaissait pas pour les collègues G. Il y a bien eu une modification qui peut laisser croire que cette différence a été gommée, mais il est faux d’affirmer, comme le disent certains, que leur rôle d’aide directe auprès des élèves, pour la prévention et la remédiation, est réaffirmé. Alors effectivement, le MEN a ajusté la formulation en ajoutant « intervention auprès des élèves… » mais cette dernière est loin de correspondre à celle de 2009 où l’on parlait d’aide directe et est très différente de celle des postes E.

Pour les postes G, les interventions se font dans les écoles, le mot classe n’apparaît pas contrairement aux postes E ; elles sont assujetties à la décision de l’IEN – ce qui n’est pas le cas des E – et répondent à « une problématique particulière rencontrée par une équipe pédagogique. » alors que les E s’intéressent « aux besoins identifiés des élèves » Ce glissement n’est pas anodin et là encore nous laisse à penser que les interventions de nos collègues G ressembleront plus à des interventions « d’urgentistes pédagogiques » prodiguant de bons conseils pour éviter le désastre. Une disparition progressive des postes G semble tout aussi probable alors qu’il faudrait en recréer massivement.
Lors de la première séance de travail au ministère, SUD éducation a demandé que soit inscrite dans toutes les fiches l’aide directe aux élèves, seule garante du maintien des missions des enseignant-es spécialisé-es et donc de la survie des RASED. Au lieu de cela, la formulation proposée et qui n’a pas été contestée entérine les orientations funestes du ministère. Si tel n’était pas le cas, pourquoi faire alors une telle distinction entre les E et les G ?
Pour les enfants éprouvant des difficultés, les aides concrètes pour la poursuite de leurs études seront encore amoindries. D’autre part, les inégalités sur le territoire, sur des circonscriptions ne seront pas effacées ; de nombreuses écoles seront encore privées d’interventions.

… Mais de nouvelles missions en plus

Fort heureusement, afin de maintenir l’illusion d’une entité, des missions nouvelles mais communes aussi bien aux E, G et psychos, voient le jour. Ils peuvent maintenant être mobilisés « pour le travail de suivi d’élèves de 6eme ayant rencontré des difficultés en primaire » et peuvent en plus participer au conseil école-collège. Ces propositions qui ont été maintenues et qui figurent dans les dernières fiches, nous semblent tout à fait irréalisables compte tenu de la taille actuelle des secteurs d’intervention et du nombre de postes disparus, considérant en plus pour la Loire, que la circulaire départementale précise que les postes E et G travaillent prioritaire-ment avec le cycle 1 et 2, donc très rarement voire jamais avec le cycle 3. A terme, n’est-ce pas aussi une manière déguisée de pousser vers la sortie celles et ceux qui actuellement sont chargé-es de ces missions : les COP ?
Autre nouveauté qui va diluer encore un peu plus les interventions de nos collègues : « la ressource auprès des équipes pédagogiques ». Les premières fiches annonçaient clairement la couleur : « …formation à destination des enseignants. » Sous la pression des syndicats, ce passage s’est mué en « …accompagnement des enseignants. » Faut-il s’en réjouir ? Certes accompagnement n’a pas la même signification que formation mais cette dernière mission ne doit pas incomber aux enseignant-e-s spécialisé-e-s.

Non seulement ce temps d’accompagnement sera de fait pris sur les temps d’intervention mais en plus sans aucune formation à cette nouvelle mission. Cela ne s’improvise pas. L’accompagnement est un rôle actuellement dévolu à nos collègues conseiller-e-s pédagogiques et doit le rester. Sauf que cette proposition est très cohérente avec l’idée que se fait le MEN sur le rôle futur des RASED et avec sa nouvelle entité fonctionnelle : le Pôle de Ressources.

Le Pôle de Ressources de Circonscription, pour une mort lente et douce des RASED

Le MEN veut instituer un Pôle de Ressources de Circonscription regroupant tous les personnels que l’IEN peut sol-liciter et fédérer pour répondre aux besoins et aux demandes d’aides émanant des enseignant-e-s ou d’une école.
Le projet du MEN considère que deux niveaux sont souhaitables : l’école étant le niveau opératoire et la circonscription le niveau fonctionnel, comprenez le pilotage.

Une absence de combat syndical
Lors de la présentation, FO, la CGT et SUD éducation ont immédiatement dénoncé et combattu cette idée. Nous considérions en effet que ce nouveau pilotage n’apportait aucune amélioration dans les missions des RASED mais qu’en plus elle éloignerait un peu plus les personnels du RASED de l’école.
Au lieu d’un combat syndical que nous aurions pu mener collectivement sur la constitution du Pôle de Ressources, le SNUIPP a revendiqué que les postes E soient eux aussi rattachés à cette nouvelle instance, validant ainsi cette proposition ministérielle et rendant vaines nos tentatives pour se débarrasser de ce cadeau empoisonné. Les IEN pilotent depuis de nombreuses années les RASED, mais l’autonomie de ces derniers existait bel et bien et ce sont les collègues en réunion de synthèse qui définissaient les modalités et les types de leurs interventions.

Un échelon intermédiaire ambigu
Tout maintenant sera décidé par la circonscription. Plus grave encore, cette nouvelle instance de pilotage va entraîner une dilution des interventions, rendant encore plus invisibles les collègues poste G et donc l’entité RASED.
Par ailleurs, les psychologues et les postes G ne pourront plus du tout assumer la mission primordiale de prévention de la difficulté, de l’échec, de la souffrance à l’école s’ils/elles sont éloigné-es du terrain et assigné-es à des tâches qui s’apparenteront à des commandes institutionnelles voire des injonctions.

Ces propositions permettent au mieux de gérer la pénurie et au pire, elles enterrent définitivement les RASED par de subtils changements de missions et d’implantations qui vont diluer l’ensemble des personnels RASED, les rendant à terme invisibles.
Pour les enseignant-e-s spécialisé-e-s et les psychologues des RASED, les mots ont un sens et quels que soient l’enrobage et le bricolage sémantique, ils sont en me-sure depuis quelques années – expériences douloureuses à l’appui - d’analyser et d’interpréter le discours de la hiérarchie et du pouvoir qui sans les dissoudre ou les faire disparaître, propose des formes de fonctionnement et de répartition qui détruiront lentement et sûrement toute possibilité pour elles et eux d’effectuer leurs missions de service public au plus près des élèves, des familles et des enseignant-es.
La priorité, ce n’est pas de modifier les textes. Il y a un besoin urgent de créer des postes et d’envoyer des personnels en stage pour les pourvoir.
Pour SUD éducation, ces projets sont inacceptables. Il est encore temps de construire ensemble une mobilisation pour un réel redéveloppement des RASED.

Disparition des RASED :le changement dans la continuité

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